Wall of sound – mur de son, c’est comme cela que Phil Spector a appelé en 1962 sa manière de surcharger et multiplier le son dans le studio de manière que l’on a l’impression d’écouter un énorme orchestre dans un espace gigantesque. Ce que servait à l’époque pour amplifier la fascination musicale popiste est devenu, par son utilisation dans les courants sonores comme Industrial et Noise, un geste à part entière. Rémy Tardieu, en connaisseur de l’histoire musicale, travaille à l’endroit où ces deux limitations de l’espace – mur et geste – se rencontrent.
        Fortement inspiré par une réflexion critique des réalités urbaines et industrielles, que l’on pourrait retracer jusqu’au début du XXème siècle, aux poèmes auditives de dAdA, leurs tableaux-collages et manifestes, Rémy Tardieu amène le spectateur à un lieu ou ces sons et échos se transforment. En utilisant les possibilités visuelles et sonores de l’installation, teintées par les ancêtres comme Kurt Schwitters, Hugo Ball, ou la musique concrète comme l’Étude aux chemins de fer de Pierre Schaeffer 1948, l’artiste crée des environnements pour évoquer « des sentiments amplifiés et illustrés par des boucles mécaniques » comme il écrit pour « Écroulement des Apothéoses » de 2013. Il suffit d’écouter ce « court-métrage sonore », disponible sur Internet, pour comprendre que son travail ne cherche pas simplement à secouer ou à séduire. Il s’agit d’une mise en espace, où devrait-on dire, en rappelant le terme du « tapis de son », d’une mise sous pied des soundscapes. Cela pour que le spectateur puisse entrer dans l’espace intermédiaire entre mur et geste, entre sculpture et mouvement, entre objet et histoire.
Que cet espace soit continuellement en transformation, qu’il soit mouvant comme du sable, s’entend. Qu’il soit mis en mouvement par les objets, le son, ses médias et leur histoire, résulte de l’expérience que nous propose Rémy Tardieu avec des installations comme « Les Sacre » de 2013, où cinq platines vinyle jouent simultanément différentes interprétations du Sacre du Printemps de Stravinsky. Avec cette composition nous remontons, encore, à l’année 1913. Pour, peut-être, revenir avec un bout d’espoir à la recherche d’une clairière dans ces temps obscurs, un monde derrière le mur.
Peut-être.
       Car, comme suggère « Renaissance », le troisième acte d’«Écroulement », cette espoir peut aussi bien assourdir comme une berceuse embobelinant l’enfant. 
 
J. Emil Sennewald                                                                                                                     http://www.weiswald.de

"Une images brouillée, le bip d'un minuteur sont captés, ils deviennent notes, instruments, matières. 
Chaque silences se transforment en douce mélodie « noise ». 
Traversé par divers influences musicales tels que la musique narrative, ethnique, électronique et expérimentale, les répertoires sont découpés, montés et sont l'âme des installations d'une personnalité discrète au travail bruyant. 
Des esthétiques urbaines, grinçantes sont souvent les supports d'un voyage entre les formes où le son, nourrit de différents paysages, de différentes ambiances, devient outils plastique à part entière.  
Le travail de Rémy Tardieu est une sorte de stroboscope qui capte et perturbe le spectateur dans son silence"
          
                                                                                                                                                     Armance Rougiron